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24 novembre 2020

Le goût de la Démocratie

demo L’article 16 de la Déclaration dispose que « toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution »

Cela veut dire que de tous temps et en toutes circonstances le citoyen doit conserver sa souveraineté intellectuelle et morale. C’est très étrange de devoir rappeler de telles évidences, qui ne constituent en aucun cas une absolution de la délinquance ou de l’émeute. Mais la crainte de l’émeute de la part des gouvernements, et celle de la délinquance de la part des citoyens entraînent pourtant à consentir, sans rime ni raison, la mise en place de dispositifs qui affectent et affecteront l’exercice de la liberté politique elle-même.

Personne d’autre que le citoyen libre n’a qualité pour juger de l’emploi qu’il fait de sa liberté, sauf à voir celle-ci disparaître. Ainsi la loi ne peut-elle permettre à l’État de restreindre abusivement la liberté d’aller et venir, de manifester, de faire connaître une opinion, de s’informer, et enfin de penser.

On n’aura de cesse de rappeler que la souveraineté, nationale ou populaire, ne vaut que parce que le peuple se prononçant est censé être composé de citoyens libres, la liberté venant ici se substituer comme principe à l’onction divine des rois.

Et que la crise sanitaire, qui est en réalité une crise découlant de la crise du capitalisme financier, montre, encore une fois, que nous considérons toujours la République comme l’horizon indépassable du bien. Nous sommes toujours dans le même état d’aveuglement. Et rappelons, encore une fois que la liberté ne nous est aucunement naturelle.

Simone Weil disait que « l’État est une chose froide qui ne peut pas être aimée ; mais il tue et abolit tout ce qui pourrait l’être ; ainsi on est forcé de l’aimer parce qu’il n’y a que lui. Tel est le supplice moral de nos contemporains »(1).

Or, aujourd’hui la pandémie a permis l’instauration du règne de la société numérique (Stiegler, disparu en août dernier, parlait de société automatique), et de l’avilissement de l’homme dans un nouvel esclavage. Et une fois encore, souvenons-nous des paroles de la grande philosophe Simone Weil à ce sujet : « Lesclavage avilit l’homme jusqu’à s’en faire aimer. La vérité, c’est que la liberté n’est précieuse qu’aux yeux de ceux qui la possèdent effectivement ».

Et cet esclavage, ces confinements successifs, ces contraintes de plus en plus douloureuses ont généré de graves pathologies, qu’enfin le ministre actuel de la Santé a reconnu, celles qui appartiennent au domaine de la psychiatrie. Or, dans la pensée néolibérale, les dépenses de psychiatrie sont des dépenses inutiles, pour des gens inutiles, voire dangereux. En effet, l’hôpital psychiatrique est soumis depuis une trentaine d’années à suivre des protocoles, à obtenir des certifications, des évaluations en tout genre… On réduit le temps dédié à la relation, on enferme de plus en plus et on augmente les doses de médicaments. Les soignants en perdent le sens de leur travail(2). 

En conclusion de ce long édito, je laisserai la parole au docteur Edouard Zarifian : « Face à la souffrance qui accompagne tant d’événements de l’existence, c’est le goût de vivre qui nous permet d’aimer, d’aider et de soulager. C’est l’échange de paroles qui fait de nous des humains, qui façonne nos mondes intérieurs. C’est la parole, source de nos bonheurs comme de nos peines, qui nous fait vivre dans un mélange subtil de réel, d’imaginaire et de symbolique. Pour savourer le goût de vivre, sachons ensemble retrouver la parole perdue, car nous avons tant de choses à nous dire. »(3)

 

1 L’Enracinement, de Simone Weil 1942, Flammarion

2 La révolte de la psychiatrie, les ripostes face à la catastrophe gestionnaire, de Mathieu Bellahsen et Rachel Knaebel, éd. La Découverte

3 Le goût de vivre d’Edouard Zarifian, éd. Odile Jacob, 2007

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