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9 janvier 2020

Habillés pour l'hiver. Les vide-dressing sont-il si bon pour l'environnement ?

Les soldes d’hiver débutent ce mercredi. Ils vont durer quatre semaines. Mais est-il bien raisonnable d’y succomber cette année encore ?

Le prix délirant de l’immobilier à Paris a au moins un avantage sur le plan environnemental : les appartements sont trop petits pour accueillir des dressings dignes de ce nom, l’accumulation de vêtements y est découragée, la sobriété n’est pas un choix mais une nécessité, le bilan carbone des garde-robes y est donc bien meilleur qu’en province.

Car c’est un fait bien connu désormais : l’industrie de la mode pollue, elle n’est devancée au palmarès que par celle du pétrole. Je lis sur le site du gouvernement que la fabrication d’un jean nécessite 11000 litres d’eau, soit l’équivalent de 285 douches. D’après mes calculs, avec l’eau utilisée pour fabriquer 60 389 jeans, on pourrait donc remplir le Stade de France (comparaison absurde mais vous verrez qu’avec un bon référencement, elle peut devenir virale).

Si l’on additionne production, transport et entretien des vêtements produits chaque année, on obtient un total d’1,2 milliard de tonnes de gaz à effet de serre. Les esprits malicieux rétorqueront qu’avec l’augmentation des températures, le besoin de se vêtir va s’en trouver considérablement allégé, un tee-shirt, un short, des tongs, et le tour est joué. Mais, pour reprendre la formule du très intéressant et trop méconnu magazine Silence (qui consacrait son numéro d’octobre à ce sujet), ‘’en attendant que le réchauffement climatique rende la nudité socialement plus acceptable’’, sans doute faut-il réfléchir à une autre façon de s’habiller.

vide Mais la période des soldes n’est guère propice à un tel changement d’attitude. L’achat compulsif suit le trajet inverse au prix des vêtements : le premier s’emballe quand les seconds dégringolent. Sachant qu’il n’y a plus de saisons pour les promotions, quasi-permanentes, si bien qu’en 2015, 45 % des vêtements ont été achetés en solde !

C’est ce qu’on apprend à la lecture d’’’Une mode éthique est-elle possible ?’’, le livre de la sociologue Majdouline Sbai. On y lit, par exemple, qu’en un demi-siècle, le budget habillement des ménages français a été divisé par deux, tandis que dans le même temps, le nombre de vêtements achetés a constamment augmenté, jusqu’à atteindre 600 000 tonnes par an, ce qui donne un aperçu de la qualité de la marchandise.

Cette boulimie vestimentaire rappelle le phénomène décrit par les économistes du climat, à propos de l’efficacité énergétique. Quand celle-ci s’améliore, le prix de l’énergie baisse, nous sommes tentés d’en consommer plus : pourquoi me priver puisque c’est économique ?

Comme toute comparaison, celle-ci a ses limites. Par définition, la mode est périssable, elle implique qu’un vêtement soit hors d’usage avant même que d’être usé, d’une certaine manière, on pourrait lui attribuer la maternité de l’obsolescence programmée. D’où cette incongruité à parler de mode éthique : ‘’un oxymore’’ nous dit encore la revue Silence, ‘’tant les effets de la mode reposent sur la possibilité d’un renouvellement rapide de sa garde-robe à un prix accessible’’.

Oui mais c’est faire peu de cas, me direz-vous, de la prise de conscience de certains fabricants, qui investissent dans le vêtement durable, et des consommateurs, qui optent pour le recyclable. Certes, un tiers seulement de la production textile est réintroduite dans le circuit (le reste est détruit), mais la fripe est de plus en plus tendance, si bien que, pour briller en société, vous avez intérêt désormais à acheter votre jean Hermès dans un dépôt-vente plutôt que sur les Champs-Elysées. Oui, dans un dépôt-vente : la loi anti-gaspillage en cours de discussion interdira bientôt la destruction des invendus non-alimentaires, les grandes marques vont, elles aussi, devoir se mettre au recyclage.

Alors vive la fripe ? Oui mais…bof. D’abord parce que la pratique en ligne du vide-dressing, devenue un complément de revenus, encourage la surconsommation plutôt qu’elle ne la dissuade : un site comme Vinted n’est pas un modèle de sobriété mais de déculpabilisation.

Ensuite que parmi les adeptes du genre, il y a une personne de mon entourage, qui souhaite rester anonyme et que, par souci de discrétion, nous appellerons ‘ma fille’, ma fille qui a chiné la semaine dernière une sorte de blouson, trop grand pour elle, confectionné dans un tissu froissé, moitié polyester, moitié papier-mâché, aux couleurs si criardes que même un styliste des années 80 n’aurait pas validées. Je vais l'emmener faire les soldes, les vrais.

Source : France Culture

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