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24 octobre 2019

La valeur inestimable des baleines (et des chauves-souris)

baleine La nature nous rend de nombreux services. Est-ce une raison pour les monnayer ?

’Tu devrais lire ça, c’est hyper intéressant’’. Deux de mes collègues m’interpellent hier, pour me conseiller la lecture d’un article de Libération consacré aux baleines. On y apprend que ce grand mammifère marin est un véritable chasseur de carbone : "lorsqu’elle meurt et qu’elle coule au fond de l’océan, une grande baleine piège à elle seule 33 tonnes de CO2 pendant plusieurs siècles avant de se décomposer’’. Plus il y a de baleines, moins il y a de gaz carbonique dans l’atmosphère. Et plus il y a d’oxygène d’ailleurs, grâce au phytoplancton, indissociable des premières.

De ce point de vue, ‘’une baleine vaut des milliers d’arbres’’. L’ensemble de la population équivaut ‘’à la valeur de quatre forêts amazoniennes’’. C’est ce qu’on peut lire dans un rapport du Fonds monétaire international publié le mois dernier, rapport qui a directement inspiré l’article de Libération.

Ses auteurs adoptent la logique suivante : puisque les baleines sont utiles, il faut les protéger. Or leur protection a un coût : pour convaincre les décideurs d’investir, il faut démontrer l’intérêt économique qu’il y a à le faire, en donnant un prix aux services rendus par les baleines. Selon le FMI, il est de 2 millions de dollars par animal, de 1 000 milliards pour l’ensemble de la population.

Cette approche qui consiste à évaluer les services rendus par la biodiversité n’est pas nouvelle. Il en est souvent question à propos des abeilles. Sans abeilles, pas de pollinisation, sans pollinisation, plus de reproduction pour de nombreuses plantes nécessaires à notre alimentation. Selon des chercheurs de l’INRA, la valeur économique de l’activité des pollinisateurs est de 153 milliards d’euros chaque année. C’est dire la valeur des abeilles, c’est dire l’importance de les protéger.

Une telle approche parait logique, rationnelle. Il ne s’agit pas de sauver la biodiversité au nom de considérations morales, ce qui n’est pas toujours mobilisateur, mais en vertu de son utilité, des bénéfices qu’elle nous procure.

Sauf que, comme souvent, ce qui parait séduisant au premier abord ne résiste pas longtemps à un examen plus approfondi. Ainsi, le fait de donner un prix à des services rendus par une espèce animale peut se retourner contre celle-ci : que se passe-t-il si une nouvelle technologie permet de faire le travail de pollinisation à moindre coût ?

Dans leur livre Faut-il donner un prix à la nature ?’ (Les Petits Matins), les économistes Aurore Lalucq et Jean Gadrey enrichissent la démonstration en prenant l’exemple des chauves-souris. Les chauves-souris ont un péché mignon : elles adorent manger les insectes. Elles en mangent tellement qu’une étude américaine, publiée en 2011, estimait qu’elles permettaient, aux seuls agriculteurs des Etats-Unis, d’économiser 23 milliards de dollars par an en insecticides.

Attention, terrain glissant, nous disent Aurore Lalucq et Jean Gadrey. D’abord parce que ‘’la disparition de ces animaux pourrait s’avérer bénéfique à la filière productrice de pesticides’’. Moins de chauves-souris, plus de production d’insecticides : ‘’ce ne serait pas la première fois qu’une catastrophe serait bonne pour le PIB’’. En savoir plus avec France Culture

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