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3 avril 2019

Ficher 1, 3 milliard de personnes. Le projet d’identifiant unique en Inde

eyes Le plus grand système d’identification biométrique au monde, Aadhar, recense la quasi-totalité des habitants de l’Inde. Les domaines d’application de ce programme sont tellement nombreux qu’il représente de multiples dangers pour les libertés publiques.

Des trois éléments qui forment un État selon sa définition canonique – ses institutions, son territoire, sa population – le dernier est, selon M. Foucault, le plus difficile à contrôler. Historiquement, le contrôle de ces populations s’est effectué par différents dispositifs de pouvoir, que ce soit à l’échelle restreinte de sous-groupes comme les criminels, les pauvres, les patients des hôpitaux, etc., à l’échelle nationale par des activités de police systématique, ou encore par la mise en place progressive au XXe siècle de dispositifs d’identification des personnes associés à des fichiers centraux, comme celui des cartes d’identité ou des identifiants nationaux. Avec l’informatique, une nouvelle configuration de ces dispositifs s’annonce, aujourd’hui en plein développement, mais encore mal connue.

Typiquement, ces dispositifs numériques comportent trois éléments : un numéro d’identification (en France il s’agit du Numéro d’Inscription au Registre des personnes physiques, le NIR, plus connu sous le nom de numéro de Sécurité Sociale) ; un individu qu’il désigne et auquel il est relié par différentes méthodes d’identification allant de la simple assignation à la biométrie ; enfin un fichier qui relie, via leurs numéros, les individus à toute une série de caractéristiques, depuis leur nom jusqu’à leur casier judiciaire en passant éventuellement par leurs achats, leurs déplacements géographiques, les personnes qu’ils fréquentent, leurs opinions religieuses et politiques, leurs appartenances de classe, de caste, de communauté. Ces dispositifs sont aujourd’hui nourris par le développement du big data.

Nous nous penchons ici sur l’un de ces dispositifs, en train de s’installer, à grande échelle puisqu’il a quasiment entièrement couvert une population particulièrement vaste : celle de l’Inde, qui compte aujourd’hui environ 1,3 milliard de personnes. Le nom – trouvé par un publicitaire – donné à ce dispositif en Inde est à l’image de cette ambition multiforme : « fondation » (Aadhaar en hindi).

Prenant ce terme à la lettre, nous formons l’hypothèse selon laquelle ce dispositif permettrait d’opérer une triple refondation de l’État indien. Tout d’abord, dans le domaine économique, il doit permettre de réduire les coûts d’identification des personnes pour les entreprises et pour l’État. Dans ce sens, il se présente comme un bien public, une infrastructure fournie par la puissance publique et qui, à l’image des autoroutes ou d’Internet, permet de construire à partir de là nombre d’innovations économiques. C’est aussi une façon de valoriser la population au sens des mercantilistes (comme source de richesse pour une nation), d’en faire un élément essentiel de la croissance économique du pays et donc de la force de l’État. Enfin, ce dispositif d’identification des personnes, qui vise à désigner chacune par un identifiant unique (Unique ID ou tout simplement UID) dans tous les domaines, autoriserait une surveillance généralisée de la population, dans une optique plus étatiste, nationaliste et autoritaire. L’ensemble pourrait être lu comme un nouveau chapitre de « l’anatomie politique » suggérée par M. Foucault : après les pratiques pénales qu’il a étudiées, les pratiques digitales. Qu'en pense Samuel Durand, consultant en nouvelles technologies

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