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14 mai 2020

Les restaurateurs les plus militants seront les plus touchés par la crise

fresto

Fragilisé par les mesures de « distanciation sociale », le secteur de la restauration pourrait sortir complètement transformé de cette période difficile. Avec, notamment, la disparition de celles et ceux les plus attachés à la dimension écologique et sociale de leur métier, comme le craint Xavier Hamon.

Reporterre — Comment ça se passe pour les restaurateurs en ce moment ?

Xavier Hamon — Mes collègues sont très désemparés. Dans le réseau de l’Alliance des cuisiniers, on est tous engagés depuis la première heure dans la transformation de notre métier, pour lui donner une dimension écologique et sociale. Or, plus on est militant, plus on prend en compte les enjeux écologiques, climatiques, économiques, sociaux, les circuits courts, la revitalisation des territoires, et plus on est fragile.

Pour nous, faire notre travail de cuisinier, c’est chercher de bons approvisionnements et transformer la matière : cela demande du travail, du temps, du personnel compétent. Et, en plus, on voudrait payer cette compétence et ce travail, tout en ne cuisinant pas que pour une élite. On arrive rapidement à une équation difficile à résoudre. Ceux qui sont militants ont tendance à fragiliser leur entreprise, à ne pas se payer, à avoir des trésoreries tellement faibles qu’ils sont plus rapidement dans le rouge.

À ce jour, le chômage partiel n’a pas été payé aux entreprises. Donc, pour l’instant, elles payent les salaires sur leurs ressources propres et il y en a qui n’en ont pas. Elles n’arrivent pas à payer leur loyer, leurs charges. Et après, il y a la situation personnelle : le restaurateur n’est souvent pas salarié de son entreprise et sans l’activité, il n’a pas de revenu. Donc, comment paye-t-il son propre loyer ? C’est la réalité crue : il faut juste manger.

L’Alliance des cuisiniers a publié un communiqué, pour protester contre le fait que le chef Alain Ducasse, et d’autres étoilés, aillent discuter du sort des restaurateurs à l’Élysée. Pourquoi ?

C’est un coup de gueule pour exprimer le fait qu’on en a marre que l’on parle à notre place. On ne se sent pas représentés. Certes, les chefs étoilés nourrissent le prestige de la France. Mais ce type de cuisine, la haute gastronomie, est un marché très particulier. Ils bénéficient de cofinancements de leur activité avec des revenus de la publicité et de conseil, ont des contrats avec la grande distribution, l’agroalimentaire. Cela masque la réalité du métier, de ceux qui doivent vivre uniquement de leurs revenus professionnels.

Les cuisiniers de tous les jours, de collectivités, de brasseries, de bistrots, ont des engagements écologiques et sociaux qui ne sont jamais entendus. La semaine dernière, Macron a visité le pire du pire de la production de tomates sous serre, à 150 km de chez moi. Cela revenait à adouber une certaine forme de production. Le modèle dominant continue à aligner ses pions même en temps de crise sanitaire.
Craignez-vous un appauvrissement de la diversité dans la restauration ?

Ce qui est sûr, c’est qu’il y a un certain mode de restauration est prêt à prendre le pouvoir : la restauration à emporter, livrée. Même avant la crise, le développement des plateformes comme Uber Eats ou Deliveroo a donné naissance, en banlieue parisienne, à des conteneurs transformés en cuisine pour produire à la chaîne des plats à emporter. Au début, ces plateformes livraient des produits issus de véritables restaurants. Ce n’est plus le cas.

Certains restaurants vont disparaître. Il va y avoir une redistribution des cartes et les plus gros pourront se servir dans le parc immobilier vacant.  

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