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3 avril 2019

Traité de mecsplication. Rebecca Solnit : "Ces hommes qui m’expliquent la vie"

mecs La guerre faite aux femmes commence par leur interdire de parler. Les hommes, explique R. Sonit, se réservent le droit d’expliquer. C’est un trait constitutif de nos cultures, qui conduit aux pires formes d’agression sexiste.

Chercheuse, essayiste, activiste, l’écrivaine américaine R. Solnit est une intellectuelle prolifique et engagée. Sa prose vive et précise se nourrit de culture et d’humour. Ses livres portent sur l’histoire de l’art, les lieux, la politique, le féminisme (outre celui-ci, deux sont traduits en français, chez Actes Sud : L’art de la marche et Garder l’espoir). C’est sans doute ce court recueil d’essais, Ces hommes qui m’expliquent la vie, publié en anglais en 2014, qui l’a fait connaître au grand public américain et international. Il est enfin publié en français aux éditions de l’Olivier, dans la traduction fidèle de Céline Leroy. Les neuf essais qui composent le recueil, écrits entre 2008 et 2014, traitent des violences faites aux femmes et, plus profondément, des rapports culturels entre hommes et femmes et du statut de celles-ci dans les sociétés contemporaines. Chacun des essais, pour la plupart écrits à l’occasion d’un événement d’actualité, contribue à définir une thèse forte : l’idée selon laquelle le déni de parole dans tout contexte, y compris ceux qui paraissent les plus anodins, conduit à la violence. Et si l’essai éponyme pique sans doute d’emblée l’intérêt des lectrices, le recueil n’engage pas une discussion exclusivement entre femmes, mais nous appelle tous à reconnaître cette violence et à en parler pour la dépasser.

Qui a le droit de parler ?

L’essai qui donne son titre au recueil s’ouvre sur le récit plein d’humour d’une expérience vécue par l’auteure : lors d’une soirée, un homme l’interroge sur son travail – « il paraît que vous avez écrit un livre ou deux ? » Lorsqu’elle évoque son travail sur le photographe Edward Muybridge, il l’interrompt pour lui parler du « livre très important » récemment sorti sur le sujet. Puis il fait la sourde oreille, quand elle essaie vainement de lui faire entendre que… c’est elle qui l’a écrit. Dès sa parution sur le site TomDispatch en 2008, cet article de Solnit a connu un succès retentissant, suscitant même la formation du mot-valise mansplaining, traduit en français par mecsplication, tant elle décrivait un phénomène reconnaissable, une situation où un homme se fait un devoir d’expliquer à une femme quelque chose qu’elle sait déjà, voire mieux que son interlocuteur. De même, dans le sillage du texte, des universitaires américaines ont créé un site internet où elles ont posté par centaines les remarques sexistes dont elles étaient victimes – à ma connaissance, l’équivalent n’existe pas (encore) en France. Les lectrices ont reconnu une situation qu’elles avaient vécue, mais non exprimée de la sorte. R. Solnit a mis des mots sur ce qui n’était identifié que comme un malaise, quelque chose d’un peu honteux ou de pas si important, et a permis non seulement de nommer mais encore d’évaluer ce genre d’agissements. Voir l'analyse d'Anne Le Goff, agrégée et docteure de philosophie. Elle est actuellement chercheuse postdoctorale à l’Institute for Society and Genetics à UCLA (États-Unis). Sa recherche porte sur l’épigénétique et la manière dont ce nouveau champ reconfigure les rapports entre biologie et société

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