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3 juillet 2013

Chronique d’une journée moyenne. Petit Traité des barbaries banales

chroniqueLe dernier ouvrage de Patrick Laupin est un rappel des maladies de notre société. Attention : si nous arrêtons de prêter attention à ce qui se trame dans notre dos, nous y perdront ce qui fait ce que nous sommes : l’humanité. Je vous ai sélectionné ces quelques passages, qui peut-être, vous inciteront à vous procurer ce bel ouvrage :

« On verra cela concrètement quand la moitié du monde sera physiquement éradiquée de la gestion optimale des stocks. C’est à cette abrogation des liens que conduisent les insulaires du marché. Leur mondialisation prétend traiter les hommes comme des cobayes sur l’échiquier d’une loi. La concurrence à outrance, la guerre économique, sont des énormités devenues normes. Ils sont associés en cela aux maîtres de l’information qui tentent d’humilier et moquer, chaque jour un peu plus l’espèce humaine, de la distraire et la détourner de tout acte de conscience, par l’entremise de jeux débiles de la télé, ses toxiques et ses jeux de cirque. Ils tentent de divertir le troupeau afin de le sommer prochainement de débarrasser le plancher l’ayant convaincu de sa nullité »

« Un chômeur est d’abord quelqu’un dont on veut se débarrasser et il suffit pour s’en rendre compte d’avoir fait la queue pendant des heures dans les couloirs de l’Anpe ou de pointer consciencieusement à l’Assedic l’aumône de ses derniers droits. Pour le consultant plénipotentiaire de l’économie, il est un zéro, un moins que rien, un trait de blancheur, une rature rayée d’indifférence et on ferme. Et quand à lui-même, devant le flot consumériste de la société il est d’abord quelqu’un qui a peur car il sait très bien qu’il n’existe plus à partir du moment où il ne peut plus payer. Dans la prière basse de son for intérieur il ressent l’abîme et l’angoisse du lendemain chancelle sous ses pas.  Et ceux qui se font les hérauts de la vie consommée sont des têtes de mort de l’épargne et du pouvoir qui méprisent les terribles éclipses de la vie »

« Et il importe peu de savoir si ceux qui se sont compromis sont coupables ou non mais de bien considérer et voir qu’ils se sont laissé entièrement corrompre par la cause qui flatte l’inhumanité et ses bassesses. L’époque aura d’ailleurs fait preuve de telles indulgences et complaisances, envers les pires vulgarités, turpitudes et indignités humaines, qu’il est évident que les laquais qui servirent de médiateurs étaient les affidés du système et qu’ils avançaient pieds et poings liés, pour servir leurs idoles. Ils furent les relais de cette monstrueuse impasse qui consiste à couver la langue des maîtres et à arborer les insignes sanctifiés du dogme consumériste en vue d’établir son univers concentrationnaire au cœur de la destruction des sociétés civiles »

« Ceux qui ont programmé cyniquement l’analphabétisme vont devoir apprendre les nouvelles règles d’un jeu sauvage qui ignorera délibérément, lui, l’altruisme et les lois de l’hospitalité. La vie psychique ne se découpe pas en nombre et en tranches sans conséquences terribles et néfastes et on verra bientôt à découvert, à quel point le fait de considérer les vivants comme des dispositifs ou des processus, selon les langages débiles des officiels de la parodie communicante, a ouvert les hostilités. Ces apprentis sorciers ont enclenché les ressorts perfides d’une inhumanité d’homme qui rétorquera par la mise à feu et la destruction de tous les liens. Cette parodie de la vie a déclenché et en profondeur une guerre des conceptions et des mentalités du fait d’être au monde ».

« On ne pourra pas éternellement déconsidérer les gens qui soignent, enseignent, cherchent, éduquent, sans aboutir au constat rédhibitoire que ce mépris d’humanité détruit le sens de ce qui nous civilise en commun. A brève échéance il va falloir rendre des comptes et c’est sur le terrain d’existences enfouies sous les décombres que vont avoir lieu les plus grands combats »

« Les assauts et les débats de la volonté ne servent à rien, ils obstruent, ils sont la négation du dialogue, ils prouvent les maîtres. Nous sommes dans l’épreuve du feu. Selon la porte d’entrée que l’on prendra ce sera le choix des liens qui civilisent ou l’inhumanité et la dégradation croissante qui criminalise en profondeur. Il n’y a plus de dialogue social car il n’y a plus d’esprit du peuple. Rien que des vies fausses et des richesses présumées. Dans cet univers du mensonge même les gens sans argent résonnent (raisonnent ?) comme des riches, des banques ou des parcmètres, tout au crédit, tout en avant des gloires et les stars et les stades. Pourquoi pas nous ? Pourquoi pas moi ? Les fastes des renommées et des célébrités, des people, obscénités énormes, ont répandu partout les étincelles terribles de l’ignorance et de la mort. On pense à crédit, on se présume suffisant par soi-même, nouveau quiproquo du solipsisme et des liens coupés avec les générations et les modèles vivants de la tradition. Si ne s’inventent pas d’autres pratiques d’être, de créer, de penser, de vivre en commun, se sera la fin de tout. C’est déjà la fin »

Chronique d’une journée moyenne. Petit Traité des barbaries banales, de Patrick Taupin, éditions La rumeur libre, 2012

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