Le chômage : « humain, très humain », par Laurent Dubois*

Les marées, le rythme des saisons et le défilement des secondes. Ces trois phénomènes naturels ont un point commun. Ils échappent à la volonté humaine. Les avions défient les fuseaux horaires. La chirurgie esthétique permet de gonfler des lèvres ou de « remplumer » un crâne dégarni (et on ne sourit pas, merci). Mais quelles que soient les avancées technologiques, certaines choses à l’emprise des hommes. De nombreux commentateurs intègrent dans la liste le chômage.

D’après eux, ce cyclone social dépend d’une météo céleste. De grandes masse

Les marées, le rythme des saisons et le défilement des secondes. Ces trois phénomènes naturels ont un point commun. Ils échappent à la volonté humaine. Les avions défient les fuseaux horaires. La chirurgie esthétique permet de gonfler des lèvres ou de « remplumer » un crâne dégarni (et on ne sourit pas, merci). Mais quelles que soient les avancées technologiques, certaines choses à l’emprise des hommes. De nombreux commentateurs intègrent dans la liste le chômage.

D’après eux, ce cyclone social dépend d’une météo céleste. De grandes masses dépressionnaires, évoluant dans l’atmosphère macro-économique, nous condamnent à l’impuissance. La mère Nature a une fille. La première déchaîne les vagues et les vents. La seconde fait souffler les plans sociaux et soulève la courbe des sans-emplois.

Cette vision « naturaliste », fataliste, n’est pas complètement fausse. L’économie est une création humaine. Mais la créature échappe, largement, à son créateur. Le « Frankeinstein » de la finance vit sa vie. L’informatisation des salles de marché dépasse complètement les opérateurs. La rapidité et la masse des transactions interdit quasiment tout contrôle. Les auteurs de science fiction en ont rêvé. Le 21^ème siècle l’a fait. Les machines gouvernent la planète financière. Néanmoins, l’emploi n’est pas en « mode automatique ». Les libéraux s’en remettent à la « mains invisible » d’une économie désincarnée. Mais, en réalité, les décisions humaines pèsent dans la balance. Un fait rappelle cette évidence : la zone euro est la seule à rester « plantée » dans le marais de la récession. Les Etats-Unis et l’Asie sortent de la crise.

Ce décalage est lié à des choix. Des choix faits par des êtres de chair et de sang. En effet, les pays européens on engagé, en même temps, des politiques de rigueur. Cette austérité généralisée a tué la croissance. Certains économistes ont tiré le signal d’alarme. Mais Berlin, Parie, Madrid et Rome se sont bouché les oreilles. Après des décennies de laxisme, ils ont, brutalement, augmenté les impôts et sabré les dépenses. Conséquence prévisible, le pouvoir d’achat chute. Le carnet de commandes des entreprises se vident. Face à cette contraction de l’activité, les embauches reculent et les licenciements s’accumulent. Ce cercle « vicieux » est digne du « Malade imaginaire » de Molière. Les « médecins » veulent plaire aux marchés et pratiquent sans discernement la saignée. Mourir en bonne santé est un objectif masochiste. Le but d’une thérapie est de soigner. Certainement pas d’aller, le cœur léger, au cimetière. La réduction des déficits est nécessaire. Les Etats européens ont besoin de se mettre à la diète. Mais, faute de politique économique commune, ils ont mis au menu la disette. Cet aveuglement est totalement absurde. Le marché intérieur européen est une source essentielle pour nos entreprises. L’Allemagne réalise une bonne partie de son commerce extérieur chez ses voisins. Cette interdépendance aurait dû inciter à une certaine flexibilité. Plus que jamais, une réforme de l’Europe est nécessaire. Autrement, elle va continuer à ajouter de la crise à la crise.

* Laurent Dubois est chroniqueur à l’hebdomadaire Le Tarn libre

Illustration : Walt Handelsman, repérée dans le blog Les Crises