La société collaborative, réalité ou fiction encore ?

Hier soir, Arte diffusait un reportage intéressant sur les différents schémas de la consommation collaborative (dont j'ai déjà parlé ici). En Suède, par exemple, on peut louer des vêtements d’occasion plutôt que les acheter. On peut louer sa voiture à son voisin plutôt que dépenser plus chez un loueur professionnel, et bien d’autres astuces. En Allemagne, une superette collaborative a vu le jour dont les finalités sont de très bons produits et l’embauche de personnes en grande précarité. Alors, on peut penser que notre société a débuté sa mutation en matière de consommation.

Ce qui m’amène à rejoindre la pensée de Jacques Lecomte, à savoir que l’épanouissement personnel et l’action commune sont non seulement compatibles mais se conditionnent réciproquement l’un(e) l’autre chez certaines personnes. Et, cela est fortement souhaitable, il faut aussi que l’action publique suive cet élan novateur. Et, selon cette approche, il ne peut y avoir véritablement de transformation personnelle que si elle est accompagnée d’une transformation sociale et sociétale. Et réciproquement. Parmi d’autres, deux associations françaises sont porteuses d’une telle dynamique : « Démocratie et spiritualité » et « Interactions transformation personnelle-transformation sociale ».

L’association « Démocratie et spiritualité » affirme dans sa Charte qu’une nouvelle époque a commencé, qui exige des approches novatrices, en particulier celle consistant en un double effort d’approfondissement de l’exigence démocratique et de renouvellement spirituel. « L’alliance de l’un et l’autre et leur fécondation mutuelle constituent une idée-force à rechercher notamment pour :

• favoriser chez chacun(e) un développement personnel plus unifié grâce à un meilleur équilibre entre intériorité et engagement, entre liberté individuelle et appartenance communautaire,

• retrouver une culture politique et spirituelle ouverte à la radicalité et à l’utopie créatrices, et capables de susciter des attitudes non violentes pour la résolution des conflits, ainsi que des comportements chaleureux d’initiative et de partage ».

Adhérer à cette Charte implique quatre engagements :

• s’efforcer de vivre de façon authentique et simple, en cohérence avec les exigences de son chemin intérieur. Cela peut être facilité par l’adoption d’une règle de vie personnelle, comportant à la fois travail sur soi, écoute de l’autre et partage avec les plus faibles,

• apprendre à connaître et à respecter d’autres formes d’expérience et de spiritualité que la sienne, et faire de ce dialogue un support de son propre cheminement,

• soutenir et promouvoir, dans son activité professionnelle ou civique, des actions concrètes reposant sur une inspiration éthique ou spirituelle.

Jean-Baptiste de Foucauld, l’un des principaux animateurs de cette association, n’hésite pas affirmer qu’«il faut oser poser la question du sens comme une question politique. Le moment est ainsi venu de donner une nouvelle ambition à la démocratie : combattre pour le sens, mais dans une acception nouvelle, qui n’est pas celle du sens collectif et uniforme d’une idéologie. La société démocratique est le lieu d’une quête de sens, menée à la fois en commun et par chacun(e) séparément. La finalité de la démocratie, c’est que chacun soit en mesure de donner le sens qui convient à sa vie* ».

Certes, ce n’est pas à la société, voire l’Etat, de nous apporter directement le sens de notre vie – cela relève de la dynamique personnelle de chacun(e) – mais l’action collective peut faciliter la mise en place de conditions culturelles, économiques et institutionnelles susceptibles de faciliter cette conquête par chacun(e).

* Une société en quête de sens, de JB de Foucault et D. Puveteau, éditions Odile Jacob 1995

Source : Donner un sens à sa vie, de Jacques Lecomte, éditions Odile Jacob, 2007